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Centre de Nouvelles Microsoft Canada

L’intelligence artificielle et l’intuition au service de la lutte contre les feux de forêt record au Canada

Travaillant depuis longtemps en gestion des feux de forêt dans la province canadienne de l’Alberta, Ed Trenchard a l’habitude de prendre des décisions difficiles dans des situations d’urgence instables. Mais le nombre de décisions à prendre a été particulièrement élevé cette année, au cours de la pire saison de feux de forêt jamais enregistrée au pays, alors que des incendies ont forcé des milliers de personnes à fuir leur domicile et ont brûlé une superficie sans précédent de 17 millions d’hectares (42 millions d’acres), selon le Centre interservices des feux de forêt du Canada.

L’une des principales tâches de M. Trenchard en Alberta consiste à décider où déployer les équipes de pompiers, les hélicoptères et les autres ressources la veille du début prévu d’un feu de forêt. Cette tâche revient à déplacer des pièces d’échecs dans une bataille aux enjeux élevés contre un adversaire qui peut être plus dangereux que prévu… ou ne finalement pas se présenter du tout. Lui et ses collègues agents de service prennent quotidiennement leurs décisions en fonction de l’évaluation du danger d’incendie, du territoire à couvrir et de leur intuition.

« Du point de vue de l’intervention d’urgence, nous comptons sur les agents de service pour prendre une décision. Qu’elle soit bonne ou mauvaise, la décision doit être prise », fait valoir M. Trenchard, spécialiste de la gestion des feux de forêt et agent de service régional et provincial pour Alberta Wildfire, l’agence provinciale de lutte contre les feux de forêt. « La pression est considérable. »

Mais en 2022, Alberta Wildfire a commencé à utiliser un outil alimenté par l’intelligence artificielle pour aider les agents de service à prendre des décisions et à utiliser les ressources de manière plus stratégique. Conçu par AltaML, une société spécialisée dans le développement de solutions d’intelligence artificielle située à Edmonton, en Alberta, cet outil s’appuie sur l’apprentissage automatique pour analyser des dizaines de milliers de points de données et prédire la probabilité d’apparition de nouveaux incendies le lendemain, par région.

En ce qui concerne la planification quotidienne des incendies, M. Trenchard explique que les agents de service ont traditionnellement utilisé un système canadien vieux de plusieurs décennies qui évalue le danger et l’occurrence des incendies, ou le risque et la gravité prévus des feux de forêt en fonction des conditions météorologiques, de l’état des forêts et d’autres facteurs environnementaux. Ils font également appel à l’intuition qu’ils ont développée au fil de nombreuses années d’expérience et à leurs connaissances de la région pour déterminer certains éléments : s’il y a des maisons à proximité d’un feu prévu, si de nombreux feux de camp sont à prévoir lors d’une longue fin de semaine, etc.

Les difficultés surviennent lorsque le danger d’incendie est modéré et que les agents doivent prendre une décision en fonction de leur bon jugement. Cette tâche peut s’avérer complexe pour les gestionnaires moins expérimentés, et elle deviendra sans doute de plus en plus déterminante en raison de l’augmentation des feux de forêt extrêmes qui dévastent des régions dans le monde entier.

Afin de garantir une préparation optimale, de nombreux agents de service surestiment les ressources dont ils auront besoin, par exemple en engageant une équipe d’urgence en hélicoptère pour un risque d’incendie qui ne se matérialise finalement pas, explique M. Trenchard. Il ajoute que ce type de décisions a entraîné une augmentation des coûts liés aux ressources inutilisées et a réduit le nombre déjà limité d’hélicoptères disponibles pour lutter contre les feux de forêt qui se déclarent bel et bien. Il est toutefois encore plus grave de manquer de préparation lorsqu’une catastrophe survient réellement.

« En tant qu’intervenants d’urgence, nous nous trouvons dans une situation délicate. Cette année, le nombre d’hélicoptères était insuffisant. Nous avions besoin de plus de ressources que celles qui étaient disponibles, notamment des hélicoptères, des bulldozers et des pompiers », énumère M. Trenchard, expliquant que les décisions relatives à la location d’hélicoptères coûteux sont devenues encore plus cruciales en raison des graves feux de forêt de cette année.

C’est là que l’outil d’intelligence artificielle entre en jeu. Alimenté par Azure Machine Learning de Microsoft, un service Azure AI, le système de prévision de l’occurrence des feux de forêt d’AltaML peut analyser des sources de données granulaires pour donner aux agents de service des renseignements plus précis sur les régions qu’ils couvrent. Créé à partir d’une quantité considérable de données historiques sur les feux de forêt, l’outil fait des prévisions basées sur les conditions météorologiques et forestières de la région. Il intègre également des données sur les émissions mondiales de carbone et le jour de la semaine afin d’établir des corrélations entre les feux de forêt, les changements climatiques et le comportement humain.

AltaML a amélioré l’outil en continu afin de prévoir avec exactitude la probabilité d’un nouveau feu de forêt dans 80 % des cas. Selon M. Trenchard, ces améliorations ont permis de renforcer la confiance des agents de service dans l’outil depuis sa mise en œuvre l’année dernière.

« Il vient généralement confirmer ce que les agents de service expérimentés pensent et permet aux agents de service plus novices d’acquérir ces connaissances sans que cela prenne de longues années », mentionne-t-il, évoquant les départs à la retraite imminents des gestionnaires de longue date. « Cela aide les agents de service à prendre des décisions de manière plus confiante. »

Un tableau de bord convivial indique la probabilité des incendies du matin et de l’après-midi afin d’aider les agents de service à optimiser les horaires des équipes. Une validation de principe réalisée par AltaML a montré que l’outil peut aider Alberta Wildfire à optimiser ses ressources et à économiser entre 2 et 5 millions de dollars canadiens en coûts d’exploitation annuels, selon AltaML. Cette estimation résulte de l’analyse des données historiques effectuée par l’outil, qui a correctement prédit l’absence d’incendie les jours où les agents de service avaient engagé des équipes de secours ou réservé des équipements lourds qui n’ont pas été utilisés.

M. Trenchard explique que l’objectif de l’organisme, qui est d’améliorer le rapport coût-efficacité, est mis en rapport avec la gravité du feu de forêt et à la proximité des habitations. Sa vision de l’outil consiste à modéliser avec plus de précision le moment et l’endroit où un incendie va se déclarer, son évolution au cours des 10 jours suivants et ses répercussions sur les communautés avoisinantes.

« Avec l’intelligence artificielle qui nous permet de répondre aux questions concernant la disponibilité des ressources au bon endroit et au bon moment pour lutter contre les feux de forêt, nous sommes sur la bonne voie, mais je pense que ce n’est pas encore chose faite », affirme-t-il.

À l’origine des travaux sur l’outil : GovLab.ai, un centre d’innovation regroupant AltaML, le gouvernement de l’Alberta et Mitacs, un organisme de recherche à but non lucratif, pour aider les secteurs publics à résoudre des problèmes de société au moyen de l’IA. En plus de l’outil sur les feux de forêt, le laboratoire travaille sur des modèles d’IA pouvant analyser les tendances en matière d’inscription prévues dans des écoles ainsi que les images satellites des infestations de coléoptères nuisibles dans les forêts.

« Les nouvelles avancées dans le domaine de l’intelligence artificielle appliquée aident les entreprises et les gouvernements à prendre de meilleures décisions et à offrir de meilleurs services », soutient Nate Glubish, ministre de la Technologie et de l’Innovation de l’Alberta.

« J’ai créé GovLab.ai en partenariat avec AltaML afin d’accélérer l’adoption de l’IA comme outil de résolution de problèmes, ajoute-t-il. Notre modèle de prévision des feux de forêt est l’un des nombreux exemples prometteurs de la façon dont l’Alberta s’efforce de devenir la province la plus novatrice au Canada. »

Microsoft est le principal fournisseur de technologie du centre d’innovation, et des ingénieurs collaborent aux processus techniques. Ce rôle contribue à l’atteinte d’un objectif plus vaste : tirer parti de l’IA pour atténuer les ravages causés par les feux de forêt. Pour ce faire, le laboratoire AI for Good de Microsoft a notamment mis au point un cadre qui détermine la façon dont l’IA peut être utilisée pour prévoir les risques de feu de forêt. Le laboratoire travaille aussi de concert avec d’autres organismes pour détecter, prévoir et éteindre les feux de forêt grâce à des solutions d’IA. Récemment, il a employé ses modèles d’évaluation des dommages utilisant l’IA sur des images satellites des ravages causés par les feux de forêt à Hawaï afin d’aider les groupes de secours.

Pour Graham Erickson, développeur principal en apprentissage automatique chez AltaML, l’outil de prévision de l’Alberta met en évidence la puissance de l’IA et des partenariats public-privé. La mine de données historiques d’Alberta Wildfire s’étend sur des décennies et fournit des détails sur chaque feu de forêt dans la province : leur taille, leur cause, leur emplacement, le moment où ils ont commencé, leur durée, les conditions météorologiques, le personnel mobilisé, l’équipement utilisé pour l’extinction et la superficie brûlée.

Selon M. Trenchard, toutefois, l’organisme public ne dispose pas des ressources nécessaires pour interpréter ces données. Mais AltaML peut offrir l’agilité d’une entreprise privée pour transformer les données en outils qui permettront aux agents de service de mieux comprendre les forêts protégées de l’Alberta, un immense territoire de 39 millions d’hectares (soit plus vaste que l’Allemagne). La technologie peut aider à coder l’expertise de gestionnaires de feux de forêt chevronnés.

« L’apprentissage automatique nous permet d’obtenir des données plus personnalisées en fonction d’une région ou d’un modèle précis, explique M. Erickson. Cette capacité d’adaptation change la donne pour les problèmes complexes. »

M. Erickson est aussi heureux d’avoir l’occasion de faire œuvre utile dans sa province natale, où les feux de forêt ont décimé une superficie record de 2 million d’hectares (5 millions d’acres) et où il a fallu faire appel à l’aide de près de 4 000 pompiers internationaux, selon Alberta Wildfire. Les feux de forêt ont aussi menacé la production de pétrole et de gaz, en plus d’avoir perturbé la vie de milliers de personnes.

« Les feux de forêt à Hawaï et au Canada ont été particulièrement tragiques cette année, déclare-t-il. Travailler dans ce monde est fort valorisant, et quand je vois mon travail être utilisé pour remédier à ces catastrophes naturelles, c’est aussi très gratifiant. »