Haiyan Zhang a créé un objet qui change la vie d'une jeune femme atteinte de la maladie de Parkinson
Comment une montre a aidé Emma à écrire à nouveau
Adapté du texte en anglais d’Andrew Trotman.
« C’était incroyablement traumatisant et excitant à la fois. Il y avait tant d’appréhension et d’émotion en même temps. Je pensais que cela n’allait pas marcher. »
Emma Lawton est une jeune femme de 33 ans. Elle fait partie des 2 % de personnes atteintes de la maladie de Parkinson diagnostiquées avant l’âge de 40 ans. Elle nous raconte aujourd’hui, la première fois où elle a utilisé la « Montre d’Emma » – un appareil électronique porté au poignet qui l’aide à réduire de façon significative les tremblements quasi permanents de son bras, liés à la maladie de Parkinson.
Emma Lawton est directrice créative. Elle portait la montre quand elle a écrit son nom sur une feuille de papier pour un documentaire récent de la BBC intitulé The Big Life Fix. Cela a changé sa vie à jamais.
« J’étais pétrifiée. Et si ça ne marchait pas ? Et quand ça a marché, j’ai pensé que c’était fantastique. Je ne parvenais pas à comprendre ce qui se passait. Et pourtant ça a continué à fonctionner… »
À ce moment, Haiyan Zhang, qui a inventé la montre avec son équipe de recherche, entre dans la pièce et félicite chaleureusement Emma Lawton avant qu’elle ne s’assoie pour une séance de photos.
« Haiyan est géniale » raconte Emma Lawton lorsque la directrice de l’innovation chez Microsoft Research est suffisamment loin. « Elle m’a comprise instantanément. La montre a un bracelet interchangeable qui peut être de différentes couleurs. Elle a compris que je souhaitais quelque chose de sympa qui rendrait mon petit ami jaloux car il adore la technologie. Il ne fallait pas que cet objet sorte d’un magazine sur la maladie de Parkinson pour personnes âgées. Elle a compris tout cela. Et elle a été incroyablement humaine durant tout le processus. J’ai pensé : Waouh ! Non seulement, c’est quelqu’un qui maîtrise la technologie mais elle comprend aussi les êtres humains. »
Mme Zhang, dont le travail quotidien consiste à à inventer des objets avec une technologie de pointe dans le Centre de recherche de Microsoft à Cambridge, quitte la séance photo, se sert une tasse de thé et prend la place de Mme Lawton.
C’est une rare opportunité de parler à Mme Zhang qui est très demandée depuis la série de la BBC, The Big Life Fix, diffusée en décembre 2015.
« J’essaie de trouver un moyen de faire avancer les choses car j’ai reçu des centaines de messages de personnes qui voudraient cet appareil pour eux ou pour un membre de leur famille » explique Mme Zhang tout en souriant et en hochant de la tête; sa boîte aux lettres saturée étant pour elle une chose très positive. « Ce sont tous les messages que j’ai reçus. J’en ai 100 dans ma boîte aux lettres. Alors les gens me contactent sur Instagram, Twitter, LinkedIn ou mon blog. Par tous les moyens. »
Ce n’est pas surprenant que les résultats prometteurs de la première expérience de la montre d’Emma Lawton aient fait apparaître de nombreux espoirs dans la grande communauté des personnes atteintes de la maladie de Parkinson. Rien qu’au Royaume-Uni, près de 127 000 personnes sont concernées et bien que les médecins aient précisément identifié les symptômes – tremblements, rigidité des bras, lenteur des mouvements, déséquilibre – peu de choses sont connues sur cette maladie. Actuellement, il n’existe aucun remède et il n’est pas possible de prévoir qui sera affecté. Les soins, qui remettent de la dopamine dans l’organisme, ont très peu changé au cours des dernières décennies et deviennent de moins en moins efficace au fil du temps. La chirurgie du cerveau peut aider à contrôler les symptômes du mouvement mais elle ne réussit pas sur tous les patients et les personnes opérées doivent quand même continuer à prendre leurs médicaments.
« D’autres maladies, comme la sclérose en plaques, peuvent être jugulées mais ce n’est pas encore le cas pour la maladie de Parkinson. Des médicaments peuvent traiter les symptômes mais ils ne guérissent pas la maladie » explique Sally Davenport, physiothérapeute et professeur universitaire à l’Université de Londres dans le domaine de la neurophysiothérapie.
« Nous cherchons à améliorer la qualité de la vie car, actuellement, la maladie de Parkinson est incurable. Mais il faut vivre avec. Si vous souffrez d’une maladie, vous espérez toujours qu’un traitement apparaîtra et vous devez rester suffisamment en bonne santé jusqu’au moment de sa disponibilité. »
En attendant qu’un remède voie le jour, Mme Zhang a créé ce qu’elle espère être une aide révolutionnaire pour réduire les tremblements. La montre d’Emma utilise des moteurs qui créent des vibrations – un peu comme le vibreur d’un téléphone portable – afin de déconcentrer le cerveau et de l’occuper à quelque chose d’autre que tenter de contrôler les tremblements du patient. Dit simplement, Mme Zhang pense que le cerveau d’Emma Lawton est en guerre contre lui-même : une moitié tente de déplacer la main, l’autre moitié tente de l’arrêter. Les deux signaux se contredisent et s’amplifient l’un l’autre, ce qui provoque les tremblements. L’appareil au poignet arrête cette boucle de réaction.
« Il faut écouter Emma décrire son expérience car c’est un très bon moyen pour comprendre ce qui se passe sur le plan physiologique et pour en déduire des perspectives » explique Mme Zhang. « Elle dit qu’elle peut voir sa main trembler mais qu’elle ne ressent plus les tremblements car les vibrations en provenance de l’appareil remplacent la sensation physique du tremblement.
Je pense que ce qui se passe avec l’appareil, c’est que son cerveau ne détecte plus que la main tremble et par conséquent, il n’essaie plus d’arrêter le mouvement. Le tremblement cesse alors. Depuis la diffusion du documentaire, j’ai parlé avec des chercheurs en neurologie qui travaillent sur le sujet et cette façon de penser repose sur une base scientifique. »
La montre d’Emma est le dernier exemple en date du souhait de Mme Zhang d’aider les personnes dans leur vie de tous les jours, souhait dont les racines remontent à l’enfance.
Haiyan Zhang est née en Chine avant de migrer en Australie, à Adélaïde, avec ses parents à l’âge de 8 ans. Malgré son nouveau monde de « cadeaux et fêtes pour son anniversaire, parties de ping-pong, goûters l’après-midi, couteaux et fourchettes », le changement a été brutal pour elle. Elle était la seule enfant asiatique à l’école primaire, elle ne parlait quasiment pas anglais et était automatiquement classée comme une personne différente, bizarre et étrangère. Souvent, des graffiti contre les asiatiques envahissait le voisinage et elle subissait des injures agressives de la part d’automobilistes. Haiyan Zhang s’est alors repliée sur elle-même et elle est devenue timide et silencieuse.
Toutefois, une personne était déterminée à aider Haiyan à dépasser ces obstacles et à se développer. Il s’agissait de son professeur de CE2 qui s’asseyait avec elle tous les après-midis afin de lui montrer des images et de l’aider à bien prononcer les mots. « Avoir cet impact direct sur la vie de quelqu’un mène aux plus grands changements sociétaux » explique Mme Zhang plus d’un quart de siècle plus tard.
Diplômée en informatique, multimédia interactif et conception interactive, elle est nommée professeur assistant à l’Université Monash, à Melbourne. Puis elle travaille pendant un an dans la même ville en tant qu’ingénieur logiciel sur des recherches sur l’espace-temps, avant d’aller au Canada pour rejoindre l’industrie biomédicale en 2000. Plus tard, elle accepte un poste au British Design Council puis travaille pour l’entreprise innovante IDEO, et devient consultante à l’Université de Stanford et à l’Institut de conception interactive de Copenhague.
Avant ses 39 ans, elle rejoint Microsoft en 2013 et participe à l’équipe fondatrice d’une plateforme d’innovation OpenIDEO.com, où elle dirige sa propre équipe de conception. L’entreprise facilite à travers le monde le partage d’idées et la résolution de défis pour le bien des êtres humains. Elle est soutenue par des entreprises et des institutions telles que British Airways, Deutsche Bank et Havard Business School.
“Nous avons travaillé avec Oxfam qui a posté sur notre plateforme : Nous pourrions peut-être améliorer la santé des mères avec des technologies pour mobiles pour des pays à faibles revenus ? Amnesty International a demandé : Comment la technologie pourrait-elle aider des gens à faire respecter les droits de l’Homme face à des détentions illégales ? N’importe qui peut se connecter et aider à résoudre ces défis et il est possible de travailler à plusieurs sur la plateforme. Je suis réellement fière du travail que j’ai fait pour arriver à cela car cette plateforme regroupe les choses qui m’intéressent le plus : résoudre de grands problèmes du monde réel, aider les gens, et donner les moyens à d’autres de résoudre leurs problèmes.”
« Nous avons vu des personnes qui ne travaillent pas dans le monde de la technologie, venir utiliser notre plateforme. Un policier brésilien se connecte la nuit. La plateforme lui fournit des compétences pour qu’il puisse envisager une autre carrière. Je suis passionné par tous ces défis qui concernent le bien de la société. J’ai toujours été intéressé par les grands problèmes du monde réel. »
Après plusieurs années passées à IDEO, Mme Zhang rejoint le studio Lift London de Microsoft à Londres, où elle développe des produits technologiques pour les secteurs des jouets, des jeux, des vêtements, de la vente au détail et du voyage. En mars 2015, elle devient Directrice de l’innovation chez Microsoft Research à Cambridge, un des centres de recherches que possède Microsoft dans le monde, et centré sur l’innovation technologique. Elle créé une équipe nommée Connected Play.
« Chez Microsoft, je me concentre sur les jeux destinés aux enfants et aux familles afin de réunir les jeux physiques et les jeux numériques » explique Mme Zhang, visiblement passionnée par son travail. « C’est une véritable opportunité d’utiliser la technologie pour faire quelque chose de nouveau pour des maladies chroniques qui existent depuis longtemps. »
Sur bien des plans, Mme Zhang a fait du laboratoire de Cambridge sa seconde maison. Ce laboratoire attire les esprits les plus brillants du monde entier et leur donne la liberté de penser autrement et de prendre des risques dans leurs travaux. Selon son directeur, Chris Bishop, c’est uniquement en poursuivant activement ses idées que le laboratoire peut repousser les limites de la technologie et de la science pour aider les gens.
Haiyan Zhang
Âge : 39
Poste : Directrice de l’innovation chez Microsoft Research, à Cambridge
Emplois précédents : IDEO, Institute of Interaction Design de Copenhague, Université de Stanford, British Design Council
Formation : Université Monash, Sheridan College, Interaction Design Institute Ivrea
Domicile : Londres
« Si nous voulons développer des produits et des services qui aident véritablement les gens, nous avons besoin de personnes comme Haiyan avec un esprit curieux et des compétences d’ingénieur pour comprendre ce dont les gens ont besoin et pour construire une technologie adaptée » explique M. Bishop, scientifique renommé dans le monde entier pour ses travaux sur l’intelligence artificielle.
« Nous avons ici de véritables talents et un environnement très favorable. Nous encourageons la libre exploration des idées et la prise de risques car cela est nécessaire pour obtenir de bons résultats dans la recherche. »
« Nous embauchons des personnes qui ont de vastes connaissances sur de nombreux sujets. Nous recherchons une diversité maximale dans nos équipes. Ici, à Cambridge, nous avons un ensemble de concepteurs, de scientifiques, d’ingénieurs et de psychologues qui sont des experts sur l’interaction entre les gens et la technologie. Toutes ces compétences se retrouvent dans n’importe quelle équipe qui travaille sur une technologie qui un jour sera en contact avec un client. Nous mettons en valeur les esprits très créatifs d’une équipe et nous encourageons des approches totalement différentes d’un même problème afin de trouver la meilleure solution et de la réaliser. »
Le thème de la collaboration est revenu régulièrement dans la conversation que j’ai eue avec Mme Zhang. Elle a insisté sur le fait que la montre d’Emma est le résultat du travail de toute une équipe. En fait, sa présence dans le documentaire The Big Life Fix a uniquement été due à un ami qui a pensé que sa personnalité et ses compétences constitueraient un bon atout pour ce show télévisé. C’est Jude Pullen, un ingénieur récompensé pour ses designs qui a dirigé à Londres le centre de recherche et de développement de la startup Sugru, qui a recommandé Mme Zhang aux producteurs.
« Nous y sommes allés et nous ne savions vraiment pas ce qui allait en ressortir. Nous ne savions pas à quoi le show allait ressembler. Mais la BBC l’avait commandé et nous avons commencé à tourner en décembre 2015 » explique Mme Zhang.
The Big Life Fix comporte trois épisodes, chacun s’intéressant à différentes personnes du public qui rencontrent des difficultés dans la vie quotidienne et qui ont besoin d’une solution. Le premier épisode commence avec Mme Zhang et Emma Lawton, et avec un photographe qui ne peut plus utiliser ses mains pour utiliser son appareil (c’est le défi de M. Pullen). Mme Zhang apparaît aussi dans le troisième épisode pour aider une famille dont les deux fils sont atteints de mucoviscidose.
Elle est l’un des sept experts – trois femmes et quatre hommes – qui souhaitent changer la vie des gens.
« C’était en fait un projet à part sur lequel j’ai travaillé pendant mon temps libre » ajoute Mme Zhang, avant de préciser qu’elle était à cette époque en congé maternité. Elle s’arrête de parler pendant un long moment.
« Je me sentais coupable. Mon bébé avait trois mois et je devais aller à Cornwall. Je prenais le train à 7 h du matin, j’allais à Cornwall, nous tournions le film puis je reprenais une voiture à 18 h, j’étais à Londres à minuit afin de rentrer à la maison chaque soir. »
Ces longues journées de transport et de travail la tenaient éloignée de son bébé et c’était dur pour Mme Zhang.
« Je ne sais pas comment j’ai fait. Mes collègues m’aidaient beaucoup et j’essayais de travailler pendant les weekends. Alors, j’allais à Cambridge le samedi et je passais toute la journée à tenter des choses. Ma mère est venue pour six mois et elle m’a beaucoup aidé. Elle vit en Australie. »
L’un de ses collègues est Nicolas Villar, un chercheur au laboratoire de Cambridge spécialisé dans le jeu connecté et l’amélioration de l’expérience de l’interaction avec la technologie. Surpris et intrigué par le fait que les travaux sur les tremblements de Parkinson soient encore théoriques, il a travaillé avec Mme Zhang pour développer la montre d’Emma.
« J’ai rencontré Emma et elle avait beaucoup d’idées qu’elle voulait essayer – des stylos qui amortiraient les vibrations, des constructions mécaniques, etc. » explique M. Villar. « Nous avons réfléchi à beaucoup de choses et l’une d’elles l’intéressait particulièrement, c’était les vibrations dans le poignet. Nous avons développé un anneau de test avec beaucoup de fils reliés à un ordinateur. Cela semblait prometteur mais afin de savoir si cela allait fonctionner, il fallait vivre avec et l’essayer durant des journées entières car Emma nous a expliqué que ses tremblements changeaient au cours de la journée. »
Avant la création de la montre, Emma Lawton a tenté de travailler sur ses symptômes de Parkinson, qui étaient pour le moins erratiques : « La maladie de Parkinson est très bizarre ; à un moment, vous tremblez en permanence et l’instant d’après, tout va bien. »
Elle avait pensé à utiliser sa main gauche ou à dessiner avec des stylos et des feuilles de grande taille car plus le mouvement est ample, moins le tremblement a d’importance. Mais elle a réalisé rapidement que sa solution n’était pas pratique. Elle a pensé à changer de métier mais ne l’a finalement pas fait car « le dessin est toute ma vie, c’est toujours ce que j’ai voulu faire ».
À la maison, c’était la même chose. Toutefois, Mme Lawton a découvert qu’au milieu de la nuit, elle ne tremblait pas du tout pendant un certain temps. Elle pouvait alors sortir du lit et travailler avant que les symptômes ne reprennent.
« Si je me levais à 5 h, je n’avais aucun tremblement pendant les cinq minutes qui suivaient. C’était bizarre. Je pouvais donc me maquiller et vernir mes ongles à 5 h du matin. J’ai aussi fait mes cartes de Noël à 5 h du matin. Mon ami se levait et me disait : Mais qu’est-ce que tu fais ? Tu es folle ! Mais ça ne durait pas longtemps et ce n’était pas pratique. Je ne pouvais pas faire tout mon travail à cette heure-là de la nuit. Je ne voyais pas comment corriger ce problème. »
Puis vient le moment où Emma a de nouveau de l’espoir, pour la première fois depuis son diagnostic à 29 ans, trois ans plus tôt. Plus d’un million de personnes au Royaume-Uni regardent leur télévision pour voir Mme Zhang et Simon Reeve, le présentateur du show, accompagnant Mme Lawton assise sur un canapé et tenant une petite boîte noire. La montre est à l’intérieur.
Mme Lawton admet qu’elle était terrorisée à l’idée que ça ne fonctionne pas – pas en raison du travail de Mme Zhang mais parce que la maladie de Parkinson est imprévisible. Cela aurait été une catastrophe pour Mme Zhang. Mais toutes ses peurs s’évanouissent quand son stylo touche le papier et qu’elle écrit un mot à la perfection : Emma.
Puis elle se met à pleurer de joie.
« C’est un peu comme un miracle moderne – quelqu’un qui ne pouvait plus lire ni dessiner et qui peut à nouveau le faire » explique Mme Lawton. « Et la montre marche toujours. Ce qui me remplit de joie, c’est que ce n’était pas un coup de chance extraordinaire qui n’a fonctionné qu’une fois. Je voulais marcher alors je l’ai mise à mon poignet et j’ai fait le tour de la maison pour voir ce qui allait se passer. Ça a été fantastique. Actuellement, cet appareil me redonne le contrôle de ma carrière et je peux décider combien de temps je serai encore designer. Je ne pense pas qu’Haiyan réalise tout ce qu’elle a fait pour moi. »
Tous ceux qui ont travaillé sur la montre ont hâte de la développer pour un marché plus large mais il y a encore un long chemin à parcourir avec beaucoup d’essais, de données à collecter et d’études à mener. Cela pourrait prendre des années avant qu’un produit viable voie le jour, sorte d’un laboratoire et soit fabriqué en série par des entreprises capables de le distribuer et que ce produit arrive enfin au poignet des gens qui en ont besoin.
Et alors que la réussite technologique de la montre aurait pu la ralentir, Mme Zhang a continué de travailler. Comme si avoir changé la vie d’une personne ne suffisait pas, Mme Zhang est revenue dans le troisième épisode du documentaire The Big Life Fix avec un moyen d’aider les personnes souffrant de mucoviscidose ou fibrose kystique.
Vicky Coxhead est mère de quatre enfants, deux d’entre eux souffrent de mucoviscidose. Mme Zhang, désormais mère elle-même, a rapidement réalisé qu’elle devait créer une solution pour aider Aiden âgé de 16 ans et Morgan âgé de 13 ans à mieux vivre, mais aussi pour aider Vicky, leur maman.
« Le fait de devenir maman m’a beaucoup aidé à comprendre Vicky et sa situation. Je comprenais ce par quoi elle devait passer. Je disais que nous devions prendre ce projet afin d’aider les deux garçons mais nous devions aussi réellement aider Vicky car elle était seule à porter toute la famille » nous confie Mme Zhang.
La mucoviscidose est une maladie génétique qui conduit à une accumulation du mucus dans les poumons et le système digestif, ce qui provoque des problèmes respiratoires et d’autres problèmes médicaux, comme l’augmentation du risque d’une infection. En Grande-Bretagne, plus de 10 800 personnes sont touchées par la mucoviscidose et passent des heures en physiothérapie, à suivre des traitements en kinésithérapie et à prendre des pilules.
Vicky se lève à l’aube pour commencer la première des six procédures de stérilisation par jour qui assurent que l’équipement de ses fils est sain. Lorsque cette opération est terminée, il est temps de passer au nébuliseur, à la prise de médicaments et à la physiothérapie – une étape fastidieuse de travail sur la respiration qui dure 30 minutes pour évacuer le mucus en toussant. Cette procédure doit être faite trois fois par jour pour chaque garçon.
Ce qui est encore plus dur pour Vicky et ses fils est que l’un souffre d’hyperactivité et de déficit de l’attention tandis que l’autre est autiste. Après avoir passé du temps avec la famille et visité leur maison à Cornwall, Mme Zhang a rapidement réalisé qu’elle partageait une passion pour le jeu avec Aiden et Morgan. Elle s’est alors demandé si elle pourrait utiliser cela pour les aider tout en donnant à Vicky la possibilité de faire une pause.
« Haiyan a immédiatement établi le contact avec les enfants » nous confie Vicky. « Ils étaient stupéfaits de la voir utiliser une Xbox. Morgan connaît par cœur des jeux et a été complètement estomaqué par les idées de Haiyan. Il fallait que ce soit amusant pour les enfants et je souhaitais qu’ils accomplissent quelque chose. Mais Haiyan voulait aussi créer quelque chose qui m’aiderait. »
La solution de Mme Zhang consiste à utiliser un capteur de pression pour transformer la respiration des garçons en contrôleur pour un jeu vidéo ou une course de voitures : plus ils soufflent longtemps, plus le personnage ou la voiture dans le jeu se déplace. Avec l’ingénieur designer Greg Saul, Mme Zhang a réalisé avec une imprimante 3D, un prototype qui s’adapte aux appareils existants de traitement de la mucoviscidose.
Mais pour créer un jeu, même simple, Mme Zhang avait besoin d’aide. Elle a alors organisé un hackathon de deux jours où des designers et des programmeurs étaient volontaires pour créer des versions beta de jeux. Au final, le prototype et plusieurs jeux ont été construits. « Le plus intéressant était que ce dispositif facilitait le dégagement des voies respiratoires pour un long moment » nous explique le professeur Eleanor Main, physiothérapeute.
Mme Zhang a aussi créé un tableau de bord en ligne pour Vicky afin qu’elle puisse suivre les progrès de ses fils dans leurs exercices.
« Mon approche consistait à donner des moyens à d’autres personnes pour m’aider à créer la solution dans son ensemble, car la tâche était imposante : il fallait créer un appareil, développer plusieurs jeux et mettre en place un service dans le Cloud avec mise en ligne des données afin de pouvoir contrôler ce qui se passait. Je voyais tous les aspects du problème mais je ne pouvais pas tout réaliser toute seule. Ce projet consistait réellement à impliquer de nombreuses personnes pour une bonne cause. »
Mme Zhang savait que sa mission était importante mais il fallait aussi qu’elle puisse faire entrer un produit fini dans un hôpital. Morgan a développé une infection et il a eu besoin d’un traitement professionnel. Bien qu’il doive rester dans son lit d’hôpital, il a vite oublié ses problèmes médicaux immédiats lorsque Mme Zhang lui a apporté le capteur numérique et une tablette. Les deux garçons ont aimé sa solution.
« Cela a changé nos vie » raconte Vicky. « Nous n’avons plus à nous disputer pour faire de la physio. Morgan la fait de lui-même, il y va et fait sa séance sans qu’on lui demande. C’est quelque chose qu’il souhaite faire car c’est amusant, et je ne pouvais pas espérer mieux. »
Mais Mme Zhang pense déjà au-delà et envisage la prochaine étape.
« Je pense qu’il faut trouver quelqu’un qui reprenne tout cela et qui fasse la version suivante de l’électronique et des prototypes, afin de rendre la solution accessible à davantage de familles » explique-t-elle.
Mme Zhang sourit et hoche de la tête avant d’ajouter : « Je suis si heureuse de voir ces enfants contents. » Et, fidèle à elle-même, elle se précipite vers sa prochaine réunion, où elle essaiera d’aider quelqu’un d’autre.