Passer au contenu principal
E² (10)

En coulisses – E² : la fabrique de l’éducation de demain

A quoi ressemblera le monde de demain ? La prochaine génération sera-t-elle suffisamment armée pour s’y adapter et l’école pensée pour tous ? Cette école sera-t-elle en mesure de s’adapter aux diversités de profils qui caractérisent la jeunesse d’aujourd’hui et de de demain ? A ceux qui ont pu être écartés des schémas classiques de l’enseignement car touchés par un handicap ? Face à une société en perpétuelle évolution, bouleversée, remise en question par les évolutions technologiques, ces questions se posent de façon toujours plus pressante et c’est le monde éducatif qui doit se faire acteur du changement. Une école 2.0, bâtie avec les nouvelles technologies. Une école où les élèves peuvent acquérir les compétences et les outils afin d’affronter les nouveaux défis. Un enjeu au cœur du salon Microsoft Education Exchange (E²) qui s’est tenu à Paris les 3 et 4 avril.

Pour sa cinquième édition, E² posait ses valises dans la capitale française, pour la première fois. Après Singapour ou Toronto les années précédentes, c’est Paris qui est devenue pour quelques jours ce centre névralgique où l’enseignement rencontre l’innovation, là où se dessinent l’éducation mais surtout les citoyens et acteurs du monde de demain. Un lieu de rencontres et d’expériences pour 400 enseignants tous plus innovants les uns que les autres, venus des quatre coins du monde, du Canada, au Mexique en passant par les Emirats Arabes Unis – la preuve, s’il en fallait encore, que la langue n’est pas une barrière lorsqu’on partage une vocation aussi profonde que celle de l’enseignement. La France est elle aussi très présente cette année, avec 70 enseignant.e.s venu.e.s elles et eux aussi échanger autour de leur passion commune : l’innovation au service de leurs élèves. Des professeurs qui, chacun à leur manière, révolutionnent l’enseignement aux collèges et lycées, les introduisant dans une nouvelle ère.

E² (11)

Basculer dans la classe de demain

Quand on parle de transformation numérique, de révolution 2.0, il est facile de vouloir coller à ces mots une étiquette de “buzzword”. De considérer qu’il s’agit de simples termes marketing, qui n’ont pas de sens dans le monde réel, qui ne vont pas changer la vie de nos enfants. Mais ces effets sont pourtant bien visibles. La technologie, considérée comme l’apanage d’un microcosme de geeks il y a quelques années, est désormais partout. Et ce ne sont encore là que les prémices, la pointe de l’iceberg. Demain, chacun devra être capable de plonger les mains dans le code et de s’en saisir, de le faire sien. Un apprentissage qu’il est nécessaire de commencer dès le plus jeune âge. Après que l’on ait commencé à faire étudier les langues étrangères dès le primaire, le code et la programmation doivent désormais constituer une nouvelle langue étrangère à maîtriser.

Le facteur clé dans la transmission de ces connaissances et de ces nouveaux apprentissages ? La stimulation intellectuelle. « Les cours de tous les jours n’exploitent pas complètement les capacités des enfants, qui peuvent s’ennuyer rapidement. L’usage d’approches innovantes, telles que les robots et l’informatique, donne plus de force aux cours et permet de stimuler nos élèves. La plateforme et les applications Microsoft MakeCode rendent concrète l’innovation dans la salle de classe grâce à des projets fun et des résultats immédiats » détaille Muhammad, professeur en Arabie Saoudite.

E² (7)

Pour autant, ce serait faire erreur que de considérer que l’avenir peut seulement se lire dans les cartes mères, applications et lignes de code. C’est aussi et avant tout, une question de compétences humaines. De capacité à collaborer, à travailler en équipe, à savoir s’adapter face à de nouveaux outils ou encore à faire preuve de créativité. Le monde de demain requiert des acteurs agiles. Sur le papier, le contrat paraît particulièrement difficile à remplir. Après tout, en 2017, le Conseil d’orientation pour l’emploi tirait le signal d’alarme sur la non-pertinence des compétences enseignées aujourd’hui dans le monde scolaire. Le “par coeur” d’un élève passif face à son professeur est encore trop souvent vu comme l’alpha et l’oméga de l’enseignement en primaire et secondaire. Certains pédagogues préfèrent voir la réflexion et l’analyse comme la chasse gardée des études supérieures, n’encourageant pas l’apparition de nouveaux processus éducatifs. Mais ce changement est nécessaire et les nouvelles technologies peuvent lui donner une impulsion salvatrice.

C’est ce qu’expérimente Solehuddin, professeur dans une école primaire à Banyuwangi, sur l’île de Java en Indonésie. Là-bas, il fait face à des défis bien particuliers, ceux de l’isolement géographique. « Notre école est située dans les zones de montagne et pose des problèmes de mobilité pour les élèves et les enseignants … Grâce aux outils Microsoft tels que Skype, les frontières ne peuvent pas nous arrêter ! Ils ont accru la motivation de nos élèves mais aussi la collaboration avec des étudiants d’autres pays. »

Grâce aux outils Microsoft tels que Skype, les frontières ne peuvent pas nous arrêter !

– Solehuddin, professeur dans une école primaire en Indonésie

Plus près de chez nous, ici en France, les usages sont différents, mais tout aussi innovants. Nathalie, par exemple, est professeure d’anglais à Dijon. Elle fait également partie de la communauté des « Microsoft Innovative Educators » présents à E² après s’être plongée pour la première fois dans ses nouveaux outils en janvier 2018. Microsoft Teams, Flipgrid et One Note n’ont déjà plus de secrets pour elle, ni pour ses élèves. Ses cours sont publiés en ligne, les outils servent aux élèves à échanger avec elle mais aussi entre eux

« Au début, il a fallu les responsabiliser, leur expliquer en leur donnant les clés d’utilisation. J’ai reçu plein de Gifs drôles le premier jour ! Mais désormais, ils se les sont appropriés. Certains partagent des documents qui peuvent servir à tout le monde, d’autres créent des groupes pour organiser des projets. Cela favorise l’échange. Ce ne sont plus une multitude de petits groupes d’amis qui s’aident, mais toute la classe qui travaille ensemble » explique-t-elle absolument convaincue.

Surtout, en tant que professeure de langues, Nathalie voit un avantage très concret à Flipgrid, « l’Instagram/Snapachat de l’éducation » comme elle aime le souligner. « Cela permet à des élèves qui sont normalement timides de s’exprimer, de libérer la parole ». Un avantage qui est selon elle symptomatique de l’intérêt concret des nouvelles technologies dans un environnement scolaire. « Ces outils favorisent le changement nécessaire en France. On ne doit plus mettre le professeur au centre de l’apprentissage, il faut rendre les élèves plus actifs en leur apprenant des compétences du XXIe siècle : collaboration, travail d’équipe, esprit critique… Le défi majeur que permettent de rendre possible ces outils, c’est de les rendre actifs, de les responsabiliser face à leur enseignement ».

Bref, revoir les mécanismes de la transmission de savoirs est un sujet central pour les enseignant.e.s, et cette nouvelle édition de l’Education Exchange en est la preuve : il est essentiel pour les adultes aussi de mettre à jour leur façon de collaborer. C’est en partageant les meilleures pratiques à travers des cultures et des systèmes éducatifs qui ne se ressemblent pas que l’on fera germer des idées radicalement nouvelles chez les profs. L’école est un passage critique pour chaque enfant, et une responsabilité forte pour chaque enseignant.e – célébrons la diversité de chacun en trouvant ce qui les rassemblent : une classe qui partage plus, et qui se réjouit d’essayer de nouvelles façons d’apprendre.

Flipgrid permet à des élèves qui sont normalement timides de s’exprimer, de libérer la parole

– Nathalie, professeur d’anglais à Dijon

Enfin c’est un enseignement qui a aussi pour objectif de répondre aux besoins de demain. Pendant que certains métiers sont destinés à disparaître, ceux des nouvelles technologies seront en manque de talents. C’est ce que souligne Jean-Philippe Courtois, Vice-président exécutif et Président monde des ventes, du marketing et des opérations de Microsoft.

« D’ici à 2022, une pénurie de talents pourrait laisser jusqu’à 30% des emplois liés à l’IA et aux données ouverts. Le perfectionnement des compétences et l’apprentissage continu devraient être la priorité des dirigeants du monde entier. Le nouveau partenariat OpenClassrooms de Microsoft soutient la croissance des compétences en intelligence artificielle et prépare les gens au monde du travail de demain ».

Une école du futur ouverte et pour tous

Un défi qui doit aussi avoir des conséquences en dehors de l’environnement purement éducatif. L’école est le terreau des citoyens de demain. C’est là où les plus jeunes apprennent à vivre en communauté, d’une façon inclusive, mettant à profit les forces des uns pour rendre invisibles les faiblesses des autres. Un rôle pour lequel les nouvelles technologies peuvent avoir un impact positif. Face au risque de la fracture numérique, l’école a désormais les armes pour répondre avec une intégration 2.0 qui fait fi des barrières en tout genre.

Parmi les laissés-pour-compte, souvent relégués à des classes spécialisées ou mal compris, on trouve notamment ceux qui se trouvent dans le spectre de l’autisme. Khalil, professeur de mathématiques à Bizeria en Tunisie mène dans ce cadre des expériences particulièrement surprenantes. « Les formes géométriques et les outils Microsoft permettent de défier l’autisme. L’idée de notre projet est de bâtir des outils et solutions ludiques adaptées au langage des enfants atteints d’autisme, ce qui facilite l’échange, la communication avec eux. Le numérique permet d’imaginer et de créer des outils et des solutions pour tous les enfants et leur permet de bénéficier de toutes les opportunités offertes par l’école », explique, enthousiaste, l’enseignant.

E² (6)

Stéphane, à Fougères, utilise de son côté Minecraft pour inciter à la réflexion, à la projection. Il a commencé à utiliser le jeu depuis cinq ans dans ses classes et mène actuellement un projet qui tourne ses élèves vers le futur. L’idée ? S’inspirer du concours “Villes et territoires de demain” lancé en 2018 par le ministère de la Cohésion et des Territoires. Ainsi, ses élèves imaginent la ville de demain, durable, écologique et pensée pour ses habitants. « J’ai vite compris que Minecraft était un outil collaboratif qui me permet de les faire travailler comme s’ils étaient sur un chantier. Cela permet de donner du sens à certains apprentissages : réalisation plan, travail d’équipe… On rend concrètes des contraintes que l’enseignement classique peut rendre artificielles » explique enthousiaste le professeur breton. Désormais, sa réputation est faite. Les nouvelles promotions qui arrivent chaque année dans son collège sont plus qu’impatientes d’apprendre autrement.

E² (5)

Grâce à Minecraft, on rend concrètes des contraintes que l’enseignement classique peut rendre artificielles

– Stéphane, professeur à Fougères

Souvent observés d’un œil circonspect, les jeux vidéo prouvent année après année qu’ils ont pourtant un véritable potentiel éducatif. D’innombrables études ont désormais prouvé qu’ils contribuent à augmenter la sociabilité, la réflexion ou l’apprentissage des plus jeunes. Mais, d’un pays à l’autre, d’un milieu social à l’autre, les jeux vidéo ne sont pas aussi accessibles à tous. L’intégration de la gamification au processus éducatif permet alors à tous d’en profiter. Kovleen, professeur de sciences en Inde, utilise ainsi Minecraft en classe pour favoriser le développement de ces compétences dans l’environnement scolaire. « Notre projet, Life on Land, adopte une approche ludique pour offrir une nouvelle vision de l’apprentissage. Par le biais de Minecraft, par exemple, de nombreux apprentissages par la gamification permettent de rendre les étudiants plus autonomes, d’accroître leur motivation, leur engagement et le développement de compétences sociales. »  

Plus qu’un rendez-vous pour simplement montrer leurs idées, ce rendez-vous de l’éducation de demain est avant tout placé sous le signe de l’échange de la collaboration, du partage. Des soft skills que les enseignants mettent à disposition de leurs élèves grâce aux outils numériques mais qu’ils mettent aussi à contribution pour continuer à apprendre, pour se former. « L’E² me permet de voir des professeurs avec qui je discute depuis plus d’un an grâce aux réseaux sociaux, j’ai pu créer du lien avec eux, discuter des usages et même apprendre comment de nouveaux outils pourraient s’intégrer dans ma salle de classe. C’est un rappel de la force de ce métier : quand on partage l’envie d’enseigner autrement à nos élèves, on n’a pas besoin de partager une salle des profs ou une langue. La passion suffit », explique Nathalie. Un avis entièrement partagé par Stéphane. Déjà présent l’an dernier à Singapour, il est revenu avec envie et passion cette année, profitant de l’opportunité pour encadrer de jeunes enseignants. « Une fois qu’on y a participé, on se rend compte à quel point c’est un événement marquant dans la carrière d’un enseignant. C’est un lieu de rencontre qui ne peuvent pas être éphémères, elles vont se prolonger, et se renouveler, s’entretenir et même se renforcer, année après année ». Du numérique au réel. Encore et encore, effaçant peu à peu les frontières.

E² (12)